J’ai été très récemment confronté a une incroyable polémique au sujet d’une très ancienne synagogue de Sousse.
J’avais été missionné par le président de la communauté juive de Tunisie, le très estimable Roger Bismuth, pour demander l’immatriculation de cette synagogue au nom de la communauté juive de Tunisie. Le président Bourguiba avait en effet pris un décret en 1958 transférant automatiquement les biens cultuels aux représentations officielles des différents cultes en Tunisie.
Ainsi donc les synagogues non immatriculées au registre foncier peuvent entrer désormais dans le patrimoine des associations reconnues par l’Etat. Ce n’est pas neutre car la plupart des synagogues sont dans un état de grand délabrement et ainsi intégrées, elles pouvaient recevoir des aides pour les entretenir, les mettre en valeur.
Que n’avions nous fait là ? Un avocat de Sousse nous a accusé de vouloir vendre cette synagogue, de vouloir brader le patrimoine, que sais-je encore. Et je peux bien entendu témoigner que les intentions du président Bismuth et celles de son mandataire pour l’immatriculer étaient aussi loin que possible de ce genre d’idées. Mais le mal était fait et la rumeur puis la calomnie n’ont eu de cesse de vouloir nous présenter, et moi au tout premier rang, comme d’affreux « jojos vénaux » et prévaricateurs.
Bien entendu il nous suffisait de produire les documents justifiant nos démarches pour venir à bout de ces commérages de hammam. A quoi bon?
Depuis 8 ans que je fais ce métier on a tout essayé pour me couper les pattes car visiblement je gêne des intérêts et surtout bon nombre de magouilles qui sont le lot commun des biens juifs en Tunisie. Et je le répète au corps défendant de l’Etat tunisien qui depuis Habib Bourguiba a toujours défendu et protégé la propriété privée. Des procédures judiciaires fantaisistes, la calomnie, j’ai tout connu. Je dis bien : tout.
Et pour finir je n’ai bien entendu jamais été ni poursuivi ni condamné par un tribunal pour quoi que ce soit. Impliqué dans des enquêtes je suis sorti de ces épreuves blanchi et non poursuivi. Grâce à l’honnêteté de juges indépendants qui ne s’en sont pas laissés conter et qui très vite ont déjoué le mécanisme des pièges que l’on m’avait tendu. J’ai initié, au nom de clients, des procédures devant tous les tribunaux possibles : je les ai toutes gagnées.
Bien sur je pourrai fournir la liste et les coordonnées des cent soixante quatorze familles que je représente et qui toutes je dis bien toutes accepteraient j’en suis persuadé de témoigner de ma loyauté, de ma parfaite rectitude et de ma ténacité en ma qualité de mandataire. Mais à quoi bon : on ne lutte pas contre le commérage et on ne gagne rien à croiser le fer contre la bêtise et la jalousie.
Ayant récemment trouvé la trace de quatre synagogues dans d’autres villes de Tunisie je serai donc vous pouvez me croire infiniment plus prudent dans mon expression.
Dans le même ordre d’idées les biens appartenant aux anciennes associations caritatives de Tunisie telles que La Goutte de Lait, l’Oeuvre de secours aux enfants, l’Union des aveugles, etc… peuvent également être transférées à la communauté juive de Tunisie.
L’idée du président Bismuth est de laisser à ses successeurs un comité sain et capable de rénover, d’entretenir des biens, de perpétuer le souvenir et les traditions d’une communauté juive qui a tout autant, voire plus que les autres, contribué à façonner la Tunisie moderne. L’existence de ces biens en témoigne. Sans les docteurs Boujnah et Moatti,sans les Ghouila-Houri et les Sberro, sans les Tubiana et les Scemama, sans les Errera et les Psaila, la Tunisie ne serait pas tout à fait la même et celle que nous aimons : ouverte sur le monde mais veillant au respect de ses traditions.
L’apport de la communauté juive à l’économie ou à la culture en Tunisie est considérable et marque encore de son empreinte la plupart des secteurs économiques et sociaux du pays. Les synagogues font partie de cet apport qu’elles soient en fonction ou deviennent des lieux de mémoire. Elles sont la Tunisie comme elles étaient la Tunisie d’hier et d’avant hier. Les transférer au patrimoine de la communauté juive les sauvera de la ruine, de l’oubli et de ……la tentation.